Another World

Antony & The Johnsons

Rough Trade – 2008
par Splinter, le 20 novembre 2008
8

Sorti en 2000, le premier album d'Antony & The Johnsons n'a toutefois touché le grand public qu'en 2004, grâce à sa parution sur l'excellent label Secretly Canadian, qui a publié avec bonheur, un an plus tard, le second opus du groupe, I Am a Bird Now, vainqueur du prestigieux Mercury Prize cette même année. Les deux disques, absolument formidables et d'une beauté incommensurable, ne peuvent se comprendre indépendamment de la personnalité d'Antony Hegarty, dont les textes traduisent à merveille la confusion des genres et l'emprisonnement corporel. Avec ces deux opus, évidemment indispensables, le groupe a créé une attente exceptionnelle de la part d'un public avide de ces compositions dites "folk psychédéliques" et bouleversé par la voix, éblouissante, fragile et unique, d'Antony.

Pourtant, il aura fallu attendre plus de trois ans pour assister à la suite officielle de la discographie d'Antony & The Johnsons. Après un aparté disco et en attendant la sortie du troisième véritable album du groupe, The Crying Light, en janvier 2009, voici Another World, un maxi sorti en guise d'amuse-gueule, sur lequel les fans peuvent se jeter sans hésitation aucune, sans crainte de devoir subir la moindre déception, même compte tenu du niveau des espoirs les plus fous placés dans ce groupe.

Car, manifestement, les cinq titres présents ici témoignent à nouveau du talent énorme d'Antony Hegarty, dont la voix, toujours aussi incroyablement belle et renversante, même accompagnée d'un simple piano, parvient miraculeusement à souffler le chaud et le froid. Aussi intimiste que grandiloquente, la musique d'Antony & The Johnsons est une pierre précieuse au milieu de l'hiver et les morceaux de cet EP, pour la grande majorité de courtes et déchirantes ballades ("Another World", "Sing For Me") auraient tout à fait eu leur place sur I Am a Bird Now. C'est dire.

Incomparable, irremplaçable, l'oeuvre d'Antony & The Johnsons fait l'effet d'une drogue dure. Et cette mini dose ne parviendra pas à combler l'attente des fans, bien au contraire. D'autant que le free jazz de la surprenante "Shake That Devil" laisse entrapercevoir une évolution musicale totalement inattendue. Vite, la suite.

Le goût des autres :
8 Nicolas 7 Popop