And Girls Club

The Strange Boys

In The Red – 2009
par Jeff, le 10 juin 2009
8

A mesure que défilent les albums et les tournées, je commence à avoir la tenace impression que l'immense succès dont jouissent les Black Lips est quelque peu surfait - n'en déplaise à mes deux collègues tombés sous le charme de leur petit dernier. Certes, le groupe nous a par le passé servi quelques morceaux absolument irrésistibles ("Katrina" et "Black Kids" notamment), mais je suis d'avis que c'est davantage la réputation sulfureuse des natifs d'Atlanta lors de concerts un peu trop souvent calamiteux que la qualité de ses compositions qui leur a permis de gravir les échelons de la notoriété avec une vitesse sidérante, à plus forte raison dans le chef d'un groupe d'apparents j'en-foutres qui se spécialisent dans un genre qui ne mobilise pas des foules démentielles, à savoir un rock garage sauvage et dopé au psychédélisme également connu sous le nom de "flower punk".

Pourtant, il ne suffit pas d'aller bien loin pour dégotter des groupes en mesure de tenir la dragée haute aux Black Lips. Prenez In The Red, le petit label qui a hébergé ces derniers le temps d'un album (Let It Bloom), et qui a également vu défiler d'autres formations férocement indés qui s'en sont elles aussi allées voir ailleurs (Jay Reatard, Boss Hog, Jon Spencer Blues Explosion…). Alors que la structure californienne nous avait il y a peu introduits aux joies du garage punk des Mexicains de Dávila 666, voilà qu'elle récidive déjà avec la parution du premier véritable album des Strange Boys, quatuor texan ayant déjà pas mal roulé sa bosse et dont la comparaison avec les Black Lips saute souvent aux oreilles... à la seule différence que les talents semblent bien mieux exploités.

Ainsi, on retrouve sur And Girls Club tout les éléments qui répondent au cahier des charges de label de L.A.: une propension à penser que le rock n'a pas évolué depuis les années 60, un chant jamais vraiment juste, un son crasseux à souhait, une décontraction à toute épreuve et le genre d'énergie pure et communicative qui vous fiche une sacrée envie de siffler une demi-bouteille d'alcool frelaté et de fumer clope sur clope jusqu'au petit matin. Classique dans sa forme et évoquant une version trempée dans la binouze des Monks ou des 13th Floor Elevators, And Girls Club s'ouvre sur une irrésistible bombe R'n'B ("Woe Is You And Me") qui annonce directement la couleur: ces quatre-là sont là pour nous divertir seize titres durant et ne reculeront devant aucun sacrifice pour arriver à leurs fins. D'ailleurs, en une bonne trentaine de minutes qu'on voit à peine défiler, l'affaire est pliée!

Inéluctable marche en avant que d'éparses ballades bien senties tentent tant bien que mal de ralentir, cette première réalisation, qu'on aurait peut-être aimé un chouïa plus courte, n'en reste pas moins un cri du cœur jouissif lancé à la tronche tous les amateurs de rock débraillé et l'affirmation de caractères bien trempés que les gars de In The Red ne doivent laisser filer sous aucun prétexte.

Le goût des autres :
7 Nicolas 7 Adrien