Alegranza

El Guincho

Young Turks – 2008
par Jeff, le 6 novembre 2008
9

« El Guincho a une qualité et un gros problème. Sa qualité, c’est la constance. Son gros problème, c’est qu’il la met au service d’une nullité totale. » AnnA Lester, Magic Revue Pop Moderne

Putain, elle est dure notre bonne AnnA. Certes, si je dois reconnaître à cette journaliste francilienne un joli sens de la formule, je ne partage pas vraiment son point de vue sur ce premier album d’El Guincho. Et comme j’ai l’outrecuidance de penser que les quelques centaines de lecteurs qui parcourent nos pages quotidiennement ne prennent pas pour argent comptant les écrits de la revue susmentionnée, je me permettrai d'y aller de mon petit avis, bien plus enthousiaste lui.

El Guincho, c’est donc le nom utilisé par Pablo Díaz-Reixa, bidouilleur de talent originaire de Barcelone. Et si son Alegranza est sorti sur un petit label espagnol il y a de cela quelques mois, il aura fallu attendre que les fins limiers du label Young Turks (qui nous avaient déjà fait découvrir les bricolos fantasques de Holy Fuck) se décident à donner à El Guincho l’éclairage médiatique qu’il mérite pour que son premier opus soit facilement disponible dans nos latitudes.

A l’écoute des neuf titres d’Alegranza, il sera assez facile de dresser un parallèle avec le Person Pitch de Panda Bear, disque magnifique qui reste encore gravé dans les mémoires des amateurs de pop psychotropée. A l’image de Noah Lennox, El Guincho affiche lui aussi, dans un déluge de couleurs criardes, son amour pour ces loops capiteux dont le seul but est de propulser son auditoire sur une autre planète où tout le monde il est beau et gentil. Et si Panda Bear allait pomper ses boucles du côté de la Californie, El Guicho a opté pour le Tropique du Capricorne et ses rythmes chaloupés qu’il enfile à la queue leu leu pour un résultat ‘garanti sans ennui’. Composées de couches multiples et portées par une voix dopée au reverb, les neufs vignettes euphorisantes d'Alegranza flairent bon les déhanchements grand-guignolesques, l’abandon de soi le plus total et la transe quasi chamanique.

Comme l’année dernière avec Holy Fuck, nos amis de Young Turks terminent l’année en beauté, en nous servant un disque qui, c’est inévitable, ne laissera personne de marbre - la preuve avec AnnA Lester qui nous en a chié une pendule. L’univers bigarré dans lequel évolue Pablo Díaz-Reixa en dégoûtera plus d’un, c’est évident. Par contre, ceux d’entre vous qui se laisseront séduire par la tambouille euphorisante d'El Guincho ne le regretteront pas. L’overdose n’est certes jamais très loin, mais c’est probablement cette promenade sur la corde raide qui rend l’écoute de ce Alegranza encore plus jouissive.

Le goût des autres :
8 Nicolas