After The Storm
Barem
Aujourd’hui, plus qu’un label, M_nus est une véritable marque de fabrique, une sorte de household name pour tous les amateurs de techno minimale – quitte à parfois donner l’impression de davantage soigner l’image de marque plutôt que la qualité des productions de la structure. Mais aujourd’hui plus que jamais, M_nus semble se résumer à la seule personne de Richie Hawtin, sous son propre nom ou sous son alias Plastikman récemment réactivé. D’ailleurs, on ne peut s’empêcher de penser que le départ des fidèles lieutenants Magda, Marc Houle et Troy Pierce du label est une preuve criante de cet état de fait un peu inquiétant et qui semble en dire long sur la personnalité de Richie Hawtin. Pourtant, le Canadien exilé à Berlin a plus d’un tour dans son sac. Et alors qu’on commençait à trouver que M_nus tournait dangereusement en rond, voilà qu’il nous sort de son chapeau le phénomène Barem. Phénomène, parce qu’il y a encore quelques années, ce jeune Argentin galérait sévère, avant de rencontrer Richie Hawtin à Buenos Aires et que celui-ci lui permette de poser sa première plaque sur M_nus, le très poli mais ô combien efficace "Opal".
Depuis lors, Mauricio Barembuem n’a pas vraiment été très actif. On peut même dire qu’on se demandait un peu ce que foutait l’Argentin, que l’on pensait à peu près autant à la rue que son équipe nationale de football. Probablement préparait-il consciencieusement ce premier album, qui vient de débarquer et qui fait de lui the next big thing en provenance de chez M_nus – faute de concurrence, il faut bien le reconnaître. Mais le vrai problème, c'est qu'il y a toujours cette obligation de travailler dans l'ombre de l’étalon-or Richie Hawtin, avec qui les comparaisons seront forcément inévitables. Et à ce petit jeu, Barem remplit avec beaucoup (trop) d’application le cahier des charges. On retrouve tout au long de cet album cette techno radicale et minimale, renvoyant cette image de modernité ultra-aseptisée tant chérie par Richie Hawtin. Et c’est bien là le problème de After The Storm : à trop jouer les producteurs révérencieux trop heureux de poser sur M_nus, Mauricio Barembuem ne fait mouche que trop rarement, se contentant d'aligner les morceaux passables. C’est dommage, car l’Argentin nous démontre qu’il peut avoir de très bonnes idées, à l’image d’un « Is » sur lequel il laisse parler ses influences et évoque la clique Cadenza ou de l’introspectif « After The Storm » et ses huit minutes de techno en apesanteur.
Au final, on se retrouve avec un disque finement réalisé, rehaussé d’une production frisant la perfection, mais malheureusement paralysé par sa crainte de mal faire – et surtout de faire autrement. Forcément, on se dit qu’il n’y a que Richie Hawtin pour éviter de voir M_nus courir à sa perte, et quand on écoute ce disque de Barem, on se dit que c’est probablement là que réside tout le problème et le paradoxe de la situation…