Absolution

Muse

Taste Media – 2003
par Splinter, le 11 septembre 2003
9

Avec ce son reconnaissable entre mille, Muse est un groupe qui déchaîne véritablement les passions. Difficile en effet de rester indifférent à l’écoute de ce rock pompeux et symphonique, à la fois Rivages Noir et Bibliothèque rose. A n’en pas douter, la bande de Matthew Bellamy est venue combler, depuis 1999 et son album Showbiz, le vide laissé par la disparition de Freddie Mercury en 1991. Comme Queen en son temps, on adore ou on déteste les albums de Muse.

Pourtant, s’il est de bon ton dorénavant de cracher les yeux fermés sur ce groupe dans la presse indie rock, l’impartialité exige de se plonger les oreilles grandes ouvertes dans le dernier opus du groupe, solennellement intitulé Absolution. Car Matthew Bellamy est bien décidé à donner l’extrême onction aussi bien aux fans qu’aux détracteurs, qui ne manqueront pas de voir leurs rangs grossir tant les limites du mauvais goût, déjà franchies sur le précédent album, ont cette fois-ci été littéralement explosées. Comme en témoigne l’intéressant documentaire contenu sur DVD bonus livré avec le disque en édition limitée, le groupe s’est fixé pour impératif de donner une dimension épique à chacun de ses titres, à grands renforts de rythmiques militaires (dispensable "Intro"), de cordes (sirupeux "Blackout"), de piano ("Sing for Absolution"), de guitares déchaînées (passionnant "Stockholm Syndrome") et des traditionnelles vocalises de Bellamy.

C’est bien simple, Muse ne connaît ni la modestie ni la retenue, et aussi curieux que cela puisse paraître, c’est tout ce qui fait leur charme. A des années-lumière de la préciosité sincère d’un Tom McRae ou de l’épure rock des White Stripes, la musique de Muse parvient de manière assez incompréhensible à captiver l’auditeur. En clair, pourquoi parvient-on à aimer ? Peut-être parce que ces trois gamins ont de manière évidente l’honnêteté d’aller au bout de leurs envies, quitte à laisser sur le bas-côté de la route tous ceux qui aimaient le côté minimaliste (toutes proportions gardées) de leurs premières œuvres. "Unintended", sans doute leur chef d’œuvre mélodique, est en effet bien loin, mais on leur sait gré d’avoir su se défaire de leurs plombantes références originelles.

Les guitares sont plus saturées et les rythmiques plus lourdes que jamais, ce qui contentera les amateurs du Muse tendance métal, tandis que le côté baroque s’est lui aussi accentué : les morceaux suivent assez rarement un canevas classique couplet / refrain / couplet, pour s’aventurer régulièrement dans des contrées plus déstructurées. A ce titre, le premier single de l’album, "Stockholm Syndrome", qui représente à lui seul la synthèse de la musique du groupe, a pu décontenancer les fans du fait de la quasi absence de support mélodique. L’ "Interlude" en piste 6 peut quant à lui être ressenti comme un clin d’œil au travail de Mansun, un groupe anglais aujourd’hui séparé, qui savait lui aussi donner à sa musique un aspect théâtral, à la limite de l’opéra burlesque.

En somme, si Absolution ne plaira sans doute pas à ceux qui avaient détesté Origin of Symmetry, on ne peut que lui reconnaître une plus grande homogénéité que le précédent opus et une efficacité certaine qui devrait pousser le groupe à aller encore plus loin dans ses recherches sonores.

Le goût des autres :
7 Julien 7 Romain 8 Popop