24/7
GusGus
Voilà maintenant quatorze longues années que les Islandais de GusGus arpentent les routes d’abord comme collectif musical (qui peut avoir la prétention d’avoir révélé la belle Emiliana Torrini des années avant son explosion) et finalement comme cador de l’electro-pop, faisant largement office de référence au sein des compositions « pas-si-niaises-que-ça ». Ils étaient douze en 1995, ils ne sont désormais plus que trois pour ce 24/7 de toute beauté. L’avantage de cette situation, c’est que les natifs de Reyjkavik ont su trouver une formule à trois cerveaux qui leur permet de concentrer leur travail avec un synthétisme en tous points brillants. Car s’il est bien un écueil qui colle à la peau de l’electro-pop moderne, c’est bien de considérer que l’aspect primesautier du genre amène bien souvent les producteurs à se laisser aller à des enfantillages de bas niveau, des babillements en piste de trois minutes qui éloignent sans cesse le genre des émotions produites par les anciens ténors du genre.
Sur ce plan-là, la machine GusGus est intransigeante. Et si on devait analyser les points les plus pertinents de cette formidable réalisation, on devrait d’abord parler de la rigueur du propos. Car aux mièvreries sucrées et plombées qui minent le genre, les dandys islandais préfèrent un son plus dur, souvent bâti sur un kick techno-pop massif, des claviers tranchants, sans oublier une constante acid aigre-douce du plus bel effet (allant jusqu’à reprendre « Take Me Baby », tube incontestable du controversé Jimi Tenor). Les parties chantées, quant à elles, refusent toujours de tomber dans le refrain inepte et largement sans âme, les paroles de « Hateful » en sont un témoin exemplaire. On oscille donc entre de vraies incursions électroniques et des chevauchées vocales posées là comme renforts continus au spectre électronique. Alors forcément, condenser autant de bonnes idées dans des comptines respectant le format des trois minutes traditionnelles aurait été une bonne occasion de gâcher le tout. Les trois lascars le savent et alignent les road-movies techno-pop tous plus longs les uns que les autres (souvent entre huit et douze minutes), allant même défourailler le dancefloor avec un « Bremen Cowboy » tellurique durant ses longues sept minutes.
Bref, on ne va pas vous la faire plus longue, 24/7 est une bombe, un monstre qui tombe encore mieux que les sorties electro-pop s’enfoncent bien souvent dans le profondément chiant et insipide. Un album puissant et tendu, qui fera vibrer nos tympans au moyen d’une pop pas tout à fait comme les autres, à tel point qu’on n’envisage pas vraiment de réel concurrent à GusGus cette année pour le titre de meilleur album de pop électronique. Must have.