Radiohead
Paris, POPB, le 9 juin 2008
Première date parisienne d'une tournée française qui comprendra également un passage aux Arènes de Nîmes ainsi qu'à Arras, dans le cadre du Main Square Festival, le concert donné à Bercy par Radiohead le 9 juin 2008 a représenté une certaine forme de victoire, à double titre.
Victoire pour les spectateurs, d'une part, parce que chaque show de la bande de Thom Yorke est un événement en soi et que se procurer des places pour celui-ci en particulier a relevé parfois de la mission impossible, entre des serveurs informatiques littéralement pris d'assaut et rapidement arrivés à saturation et une touche F5 qui aura grandement souffert. Résultat : toutes les places vendues en à peine trente minutes plus de six mois avant le concert et une satisfaction réelle au moment précis d'entrer dans le POPB, ce temple du sport, monument des années 80, au son généralement exécrable. Mais bon, c'est Radiohead, on ne va pas faire la fine bouche.
Victoire pour Radiohead, d'autre part, parce que le dispositif mis en place, procédant d'une démarche protectrice de l'environnement (concert en centre ville, invitation à s'y rendre par transports en commun…) aura été une totale réussite. La plus belle preuve aura résidé dans cette scène subtilement éclairée par des néons verticaux et cinq écrans de fond, prétendument peu gourmands en énergie, qui seront parvenu à créer une ambiance intimiste – en tout cas autant qu'une salle de 9.000 places le permette.
Centré sur le dernier album du quintet, l'excellent In Rainbows, sorti il y a un peu plus de six mois, ce show exceptionnel aura permis de constater, à nouveau, la maestria du groupe, passé expert dans l'art de faire chavirer les cœurs des milliers de spectateurs présents, grâce à une setlist absolument ébouriffante : quel plaisir, en effet, quel plaisir presque indescriptible, de retrouver live, aux côtés des magnifiques "All I Need", qui a ouvert le show, "Nude", "House of Cards" ou encore "Videotape", des incontournables telles que "Paranoid Android" (après un faux départ), "Street Spirit" (définitivement la plus belle chanson de tous les temps) ou encore "Pyramid Song", le tout sonorisé de manière plutôt décente compte tenu de la taille de la salle et surtout en comparaison de précédents concerts franchement mauvais de ce point de vue (Depeche Mode en tête).
Quel plaisir, également, d'entendre des morceaux moins connus ou moins joués sur scène par le groupe, comme "Bangers'n Mash", qui figure sur le second disque de In Rainbows, vendu uniquement dans le coffret super luxueux et au prix super prohibitif, ou encore "Like Spinning Plates" (Amnesiac, 2001). Porté par un groupe en grande forme, dont un Thom plaisantant volontiers, ce concert figurera sans doute parmi les grands moments musicaux de cette année.
Un mot pour parler de la première partie – rôle généralement ingrat joué en l'occurrence par les excellentes Bat for Lashes, qui ont fait ce qu'elles ont pu avec un public totalement indifférent et pressé de voir Radiohead. Parvenant à faire passer dans cette salle gigantesque les mêmes émotions qu'au concert du Trabendo il y a quelques mois, Natasha Khan nous aura notamment laissé entrapercevoir quelques nouveaux morceaux très rythmés, qui peuvent rappeler, à la première écoute, certains titres du Splinter des Sneaker Pimps, par leur ambiance profondément organique, voire orgasmique, en sus, évidemment, des incontournables "What's a Girl to Do?" et "Trophy" du premier album. Merci à elle.