Primavera Sound
Barcelone, le 26 mai 2011
The Tallest Man On Earth
Samedi / Scène San Miguel / 17.30
L'avantage avec le genre de folk épuré dont The Tallest Man On Earth s'est fait une spécialité, c'est qu'on évite au maximum les mauvaises surprises. En effet, il faut vraiment un ingé son à côté de ses pompes ou un artiste plein de mauvaise volonté pour rendre l'expérience chiante. Il n'en fut rien au Primavera. Face à un public baigné par un soleil généreux, Kristian Matsson n'a eu aucun mal à "occuper l'espace" avec sa guitare et foutre pas mal de frissons à quelques milliers de festivaliers venant de débarquer sur le site. Rejoint sur une poignée de morceaux par deux acolytes (notamment pour une version "pimpée" du génial "King of Spain") et accompagné sur l'ultime titre par une inconnue avec qui il a langoureusement partagé le micro, le bonhomme a signé une parfaite mise en jambe avant un reste de soirée plus que chargé et pas vraiment placé sous le signe de la délicatesse. Enfin, ce concert de The Tallest Man On Earth fut une nouvelle occasion de vanter les talents d'un des plus touchants songwriter de son époque.
Gonjasufi
Samedi / Scène Pitchfork / 20.30
On nous avait mis en garde à plusieurs reprises. On avait lu les nombreuses critiques qui parlaient d'un live show complètement foireux, quelle que soit la formule retenue (soundsystem ou live band). Mais faute d'un concert plus bandant ailleurs à cette heure, on s'est dit qu'on allait se faire notre propre idée. Le constat? C'est sûr, Gonjasufi tient probablement là le live le plus pourri du Primavera, et de très loin. A l'écoute de cette soupe reggae-punk complètement indigeste, on se demande encore bien quel programmateur voudrait booker ce type qui avait pourtant réussi à impressionner sur album. Espèce de croisement complètement raté entre Fishbone et Dubwar, dans tout ce que cette association pourrait enfanter de plus ignoble. Sorte d'expérience malheureuse en laboratoire, ce live est d'autant plus pathétique que ces mecs y croient dur comme fer. La palme du ridicule revenant probablement au pauvre batteur du groupe, convaincu que cette arnaque est juste la meilleure came du festival. Quand il sera redescendu de son trip au crack, on lui montrera cette vidéo et on regardera sa gueule se décomposer.
Matthew Dear
Samedi / Scène Pitchfork / 23.00
On aime Matthew Dear. Beaucoup. Passionnément même. Non seulement parce que ce mec est l'un des plus fiers représentants de la techno moderne, mais aussi parce qu'il est beau comme un camion et qu'il fait partie des très rares DJ's à être parvenu à passer des platines à l'expérience live dans tout ce qu'elle a de plus grisant sans que cela ne pose le moindre problème. Ceci étant dit, nous étions curieux de voir ce qu'allait bien pouvoir donner le passage à la scène des titres de son dernier album en date, le très hermétique et sombre Black City. Le résultat? Un show efficace qui relègue à l'arrière-plan le côté introspectif et anxiogène de sa dernière réalisation pour se concentrer quasi-exclusivement sur son aspect le plus dansant et le plus efficace. Et pour le coup, on en viendrait même à pardonner Matthew Dear de se déhancher dans un costume blanc du plus laid effet! Parce que pour le reste, malgré un son pas toujours au poil, c'est le fête du slibard à tous les étages pour celles et ceux qui ont préféré aller voir l'Américain plutôt que de s'emmerder sur la grande scène devant un PJ Harvey en très petite forme. Les beats tapent dur, les boucles foutent le clubber un brin aviné dans un état proche de l'hypnose et la voix de Matthew Dear est plus "croonesque" que jamais. On pourra dire que l'impeccable concert signé Gang Gang Dance une petite heure plus tôt sur cette même scène Pitchfork nous avait parfaitement mis sur les rails, mais ce serait minimiser le talent d'un Matthew Dear dont le live show poussera peut-être certains un peu rebutés par son Black City à s'y replonger avec tout l'intérêt qu'il mérite.
Odd Future
Samedi / Scène Pitchfork / 00.45
N'ayant pas trop envie de s'enquiller 90 minutes d'Animal Collective jouant plus que probablement un nouvel album que l'on n'a pas encore entendu, la venue à Barcelone du crew Odd Future semblait un choix évident. Le buzz autour des jeunes Californiens a pris des proportions tout simplement énormes ces dernières semaines et l'excitation est palpable à quelques minutes du concert. De plus, leur venue est précédée d'une réputation de sauvages de la scène, qui ne prendre que quelques secondes à se vérifier. A peine les lumières éteintes et l'un ou l'autre "Swag" et "Free Earl" balancés de derrière la scène que Tyler The Creator déboule sur l'énorme "Sandwitches" et se jette dans un public déjà bien excité. Alors forcément, quand les autres membres de la fine équipe montent à leur tour sur scène, on a rapidement un idée bien claire de la rage juvénile qui anime cette bande de post-ados que le monde s'arrache. Mais tout cela ne doit pas nous faire oublier une chose: si l'aspect visuel d'un concert est une chose, la qualité sonore en est un autre. Et à ce petit jeu, l'écurie OFWGKTA ne s'en sort pas vraiment avec les honneurs. En une petite heure de concert, on a peiné à entendre les productions de la troupe (déjà plutôt rachitiques), noyées par une avalanche de basses et la volonté des protagonistes de gueuler plus fort que le copain dans le micro – avec une mention spéciale pour Hodgy Beats. Et pourtant, malgré l'impression de se voir servir une bouillie sonore à la grosse louche, l'enthousiasme du public n'a jamais faibli, preuve s'il en est du talent de ces gamins, dont la présence scénique est tout bonnement impressionnante et déclenche des accès de rage aussi virulents que ceux déclamés par Tyler The Creator, Hodgy Beats, Left Brain ou Domo Genesis pendant leur concert. On ne s'étonne d'ailleurs pas que cette petite sauterie se soit terminée sur un envahissement de scène contre lequel la sécurité du festival n'a rien pu (ou voulu) faire. A l'arrivée, le sentiment reste évidemment mitigé et la conviction que ces gamins-là ont encore beaucoup de choses à prouver plus forte que jamais.
Crédits photo:
Noah Dodson / www.focusvif.be
Eric Pamies, Dani Canto, Susanna Lopes Blanco et Inma Varandela