TNGHT EP

TNGHT

Warp Records – 2012
par Aurélien, le 25 juillet 2012
6

La rencontre est digne d'un match de boxe: dans le coin gauche, c'est l'Ecossais Hudson Mohawke qui montre ses gros bras de tête de gondole du wonky, lui qui a fait ses premières armes dans le sillon de J Dilla avant de basculer du côté obscur en larguant l'an dernier un Satin Panthers martial qui faisait les yeux doux aux grosses sorties dirty south. Dans le coin droit, un challenger canadien bien en jambes qui répond au doux nom de Lunice, et ne prend pas les combats à la légère comme pourront en témoigner son parrain Diplo ou sa favorite Azealia Banks. Deux boules de nerfs qui se retrouvent sur le ring pour envoyer de la patate de forain par palettes le temps d'un clash moins fin qu'escompté, et où le challenger prend tout du long un précieux avantage sur le champion. Pour le plus grand plaisir d'un public en manque de swag.

Car une écoute de l'EP suffira à faire le tour du menu étouffe-neurones offert par nos deux bouchers du beatmaking: chez TNGHT, on ne fait pas tellement dans le sentimental. En fait, on préfère ouvertement faire bouncer de la biatch aux quatre coins du monde et s'autoriser une récréation primaire bienvenue au milieu de projets solos qui n'en finissent plus de soulever de l'impatience. Une forme d'entertainment pur et dur qui pose question au regard du caractère bien trempé de ces cinq uppercuts et de leur relative platitude. Mais des uppercuts qui font fatalement mouche à chaque fois vu que les deux lurons agissent ici dans leur plus pur élément, compensant les excès de l'un, rattrapant les manques de l'autre, et ajoutant un doigté de mental à leur mixture. Le résultat? A défaut d'être révolutionnaire, il est aussi efficace qu'universel. Autant donc dire que malgré un clair manque d'audace, on en a pour notre argent.

Sans doute aurait-on préféré que ce duel soit moins pachydermique, qu'il révèle cette ambiguïté que l'on avait retrouvée sur le Satin Panthers de HudMo un an plus tôt. Sans doute aussi que Lunice utilise un peu trop ses gants pour tirer la couverture de son côté, et que l'on aurait aimé qu'Hudson Mohawke envoie valdinguer plus haut cet alignement de pistes certes sauvages et épileptiques, mais aussi désespérément terre-à-terre. La vérité est que cet EP "swag de stade" se suffit aisément à lui-même et ne cherche ni la comparaison, ni à passer l'été. Plutôt à jouer un rôle de carte de visite pour annoncer la couleur de prestations live énormes qui pourraient bien se terminer sur un KO brutal du public. Toute ambition autre que la simple consommation serait trahir la raison d'être d'une telle rencontre, et ce bien que l'on ne puisse nier la formidable artillerie exhibée ici par le duo. 

Le goût des autres :
8 Thibaut 7 Soul Brotha