Guilty Cloaks
Raoul Sinier
On n'a peut-être que deux chroniques (avec celle-ci) et une sélection mixée pour la série Goûte Mes Mix, mais Raoul Sinier on l’a toujours eu dans le cœur. De ses premiers ébats jusqu’à sa révolution actuelle, ce mec nous l’aura toujours mis dans les dents comme un gros coup de barre à mine. On a même été jusqu’à le suivre dans les travées pop/post-rock du génial Tremens Industry. Guilty Cloaks est donc un disque qui forgera la nouvelle identité du Français, soit par un retour à de la déconstruction electronica/hip-hop, soit par une avancée encore plus significative dans le monde de la synth-pop toute en dynamisme. Passé « Overture 5 » et ses claviers 100% Sinier, le rideau tombe dès « She Is A Lord » : dans ce Guilty Cloaks ça chantera encore plus que jamais.
Alors faire de ce nouvel opus une vulgaire adaptation du The Eraser de Thom Yorke ça pourrait paraître gros, et pourtant on n’est pas vraiment loin de la réalité. Par là on entend une pop un poil dépressive, menée sur un rythme qui rappelle tantôt les plus belles sorties Rephlex tantôt les plus belles productions de hip-hop old school. Le ton est plutôt grave, va parfois jusqu’à miauler, mais impressionne en permanence dans les choix pertinents qu’il aligne sur une heure. Passé de chien fou à maître du savoir, Raoul Sinier est aujourd’hui là pour imposer des œuvres majeures. Il a gardé ses claviers au grain vintage et quelques fulgurances electronica, mais il a surtout rajouté des pianos et des vocalises à faire pleurer une pierre et assemble le tout dans une vraie grande œuvre populaire. Raoul nous confessait ne plus vouloir regarder la musique comme des cases à remplir, Guilty Cloaks parle pour lui. Le Francilien éclate son œuvre, compose et reviens à la base de tout : l’envie de faire de la belle musique. Et tant pis si dans sa carrière Aphex Twin a perdu ce que le leader de Radiohead a gagné en solo.
Semblable pour cela à Tremens Industry, ce nouveau disque est un grower assumé, une plaque qui gagne sans cesse en densité, qui impressionne désormais par sa pertinence finale. Finie la démonstration, l’éclatement permanent des textures, Raoul Sinier est ce surfeur qui sort finalement du tube de quinze mètres pour enfin apercevoir la lumière. Et tant pis si le ciel est plus sombre que prévu.