Blue Slide Park
Mac Miller
Un premier album est toujours un exercice délicat et déterminant pour un rookie. En effet, c’est celui qui définira la patte de l’artiste, et restera en mémoire, car les mixtapes ne sont finalement que des bribes souvent baladées par les tendances du moment, et ne bénéficient en général pas d’autant de travail qu’un album. Ensuite, il doit bien évidemment faire bonne impression, car se vautrer pour son premier album peut être très délicat pour la suite d’une carrière. A l’inverse, un trop bon album peut ensuite engendrer des déceptions à chaque sortie, ou dévaloriser les performances suivantes - Nas et son Illmatic, ça vous dit quelques chose? Pas étonnant donc, que face à une tel enjeu, nombreux sont ceux qui retardent la sortie de leur premier album. A contrario, il est temps pour Mac Miller, le kid de Pittsburgh, de lâcher Blue Slide Park à seulement 19 ans et quelques mixtapes réussies.
Il est vrai que ses débuts dans le rap ont été salués par beaucoup de gens (dont vos serviteurs), mettant en avant son flow et un genre assez hybride un peu teinté pop. D’ailleurs, l’enjeu majeur de cet opus est définitivement de délimiter un style précis, car au travers de ses différentes mixtapes, Malcom Mc Cormick a évolué sur des terrains variés sans pour autant se fixer clairement sur un seul, le sien. Et dès les premières écoutes, c’est bien le manque de repères qui nous marque. Mac Miller use pourtant de son flow athlétique et enjoué sur les tracks, mais les atmosphères de chacune des pistes présentent souvent des dissimilitudes et révèlent un manque flagrant de cohésion. Ce manque d’alchimie est après tout complexe à justifier, mais le constat est là : la sauce ne prend pas. Souvent guilleret, candide, presque adolescent (sur « Up All Night » notamment, qui sonne comme de la pop acidulée que l’on nous sert à grosses louches sur les ondes), il s’avère difficile de trouver un liant à cet album, ce qui rend l’appréciation de la galette un peu absconse. Pourtant, certains morceaux nous frappent, comme « Party On Fifth Ave » et surtout « Frick Parck Marcket ». Car Mac Miller demeure une emcee très intelligent dans son écriture, avec une capacité à rythmer et colorer des instrumentales un peu fades. A ce sujet, les productions de ce projet sont un vrai paradoxe, en constante opposition. ID Labs (aux manettes de l’album avec Ritza Reynolds et Clams Casino) fournit un travail de qualité mais semble parfois inconstant, ou du moins pas en mesure de donner suffisamment d'ossature au disque.
Si la hype autour de Mac Miller était amplement justifiée, l’attente qu’il a généré n’est pas comblée par ce Blue Slide Park. Indécis, obscur, le projet ne réunit pas une densité nécessaire pour sustenter durablement l’auditoire, habitué à plus de caractère dans les travaux du jeune rappeur. Mais rassurons-nous: la jeune homme a largement le temps et le talent pour surmonter cette épreuve, car malgré ce faux pas, il est incontestable que Mac Miller a les capacités de sortir des projets solides l’avenir, et d’imposer sa propre marque.