Surface Noise
Judiciary
Un bon label, c’est un peu comme un bon restaurant. Qu’importe si les plats de la carte ne nous sont pas tous familiers, on est en droit d'exiger un certain niveau de qualité. Et à ce petit jeu, la maison américaine Closed Casket Activities s’apparente de plus en plus à un établissement étoilé. Parce qu’elle héberge la crème de la crème de la scène hardcore/metal US (Harm's Way, Twitching Tongues, Gatecreeper), mais aussi car elle a souvent le bon goût de recruter d'ambitieux seconds couteaux (Vein, King Nine) dont le talent et le savoir-faire se révèlent rapidement.
Judiciary est ainsi la dernière addition à un menu déjà riche en riffs qui tapent très dur. Les petits gars de Lubbock avaient déjà eu l’occasion d’attiser notre curiosité en 2017 avec leur excellent EP The Axis Of Equality et il ne leur manquait qu’une maison respectable et respectée pour leur permettre d’exposer ces bonnes prédispositions à un public affamé. C’est désormais chose faite avec Surface Noise, premier disque qui se résume grossièrement à ce constat : son tout est plus important que la somme de ses parties.
D’abord parce qu’aux premières écoutes, aucune de ces neuf mises en bouche ne semble se distinguer du lot. On se mange ici un crossover hardcore / thrash balisé avant eux par Power Trip ou les Cro-Mags, si ce n'est que Judiciary semble moins s’inspirer de la tradition des 80's que de formations plus contemporaines qui font leur trou ces derniers temps. Preuve s'il en est que l’album n’est pas exempt d’un certain formatage hype, le casting s'appuie sur l’expérimenté Taylor Young (Nails, Twitching Tongues, Xibalba) à la production, Arthur Rizk (Power Trip, Trapped Under Ice) au mix ou encore Bryan Garris (Knocked Loose), Brody King (God’s Hate) et Jess Nyx (Mortality Rate) aux featurings. Pas de doute, CCA est efficace lorsqu'il s'agit de mettre tout ce petit monde en synergie.
La recette n’est donc pas particulièrement novatrice, mais n’en reste pas moins délectable. Judiciary concasse les nuques sur des textes mêlant conscience sociale et intentions violentes, et assaisonne ses plats de breakdowns gourmands sans jamais provoquer l'indigestion. Pour être clair, Surface Noise ne bouleverse rien, mais se révèle tout de même d’une implacable efficacité. Et si les garnitures sont parfois un peu grossières (combien de temps encore devra-t-on entendre le discours de Charlie Chaplin en Grand Dictateur dans des intros ?), on n'osera pas faire les fines bouches devant ce déferlement de saine violence.