Indie Cindy
Pixies
L'auteur de ces lignes était en juillet 2004 devant la scène des Eurocks de Belfort pour le grand retour des Pixies sur une scène européenne après treize ans d'absence. A cette époque le come back met tout le monde d'accord : le groupe n'a pas eu le succès qu'il mérite à la fin des années 80, a influencé toute la scène indie de la décennie 90 après avoir splitté, et enfin la reconnaissance est au rendez-vous. Tous les anciens gamins fans de Nirvana sont là pour payer leur tribut à la bande de lutins que l'ami Kurt Cobain a qualifié d'influence majeure - mais trop tard. Et la bande à Frank Black savoure, apparaissant complices comme jamais sur une scène plus grande que toutes celles qu'ils avaient foulées à l'époque.
Dix ans après ce retour en forme de triomphe, il est de bon ton de dire que ce ne fut pas une si bonne idée que ça. Des années de tournée best-of ont difficilement caché les dissensions renaissantes avant de se solder par le récent départ de Kim Deal, qui a fait ses comptes et a réalisé que les Breeders lui suffiraient pour toucher ses cotisations retraites à taux plein. Puis sont sortis trois EPs, (les biens nommés EP1, EP2 et, on vous le donne en mille, EP3), qui ont été illico dézingués par tout le monde, nous compris.
Indie Cindy, qui sort ces jours-ci, est donc leur premier album depuis Trompe le Monde en 1991, mais on en connaissait déjà tout le contenu, puisqu'il se contente de regrouper dans un ordre différent les douze titres des trois EPs précédemment cités : pas un de plus, pas un de moins, ce qui a au moins le mérite d'être clair, les Pixies ont lâché toutes leurs cartouches sur ce coup. Pas de B-sides en rab, même pas un petit edit des familles, c'est à prendre ou à laisser.
Alors on essaye de prendre. En écoutant la galette à tête reposée, on se dit quand même qu'on a été un peu dur avec les EPs. Certes l'urgence des débuts n'est plus là - mais pour quel groupe est-ce le cas trente ans après ? C'est sûr beaucoup de titres bandent mou et à l'écoute de "Blue Eyed Hexe" ou de "What Goes Boom", on se demande bien où sont passés les héros de Surfer Rosa. Sans aucun doute, ce retour aux affaires est superflu, car il n'apporte rien à la grande histoire du rock et pas grand chose à la petite histoire du groupe.
Mais on y trouve quand même quelques bons moments, parmi lesquels "Bagboy", le titre qui avait annoncé le retour en studio du groupe en juillet dernier, et le morceau titre "Indie Cindy", qui d'après Black Francis évoque le rapport au public et à la critique après tant d'absence (bien vu Franky). Vous allez lire un peu partout que ce disque est une calamité, voire une imposture. Ce n'est pas tout à fait faux quand on compare la banalité de "Green and Blue" ou "Ring the Bells" à ce qu'on aurait pu attendre des auteurs de "Wave of Mutilation". Mais ce n'est pas non plus une daube finie, disons plutôt un coup pour rien.