Big Baby D.R.A.M.
D.R.A.M.
La pochette de Big Baby D.R.A.M ne ment pas : avec ses allures de marabout au sourire radieux, D.R.A.M. est un gars sympa, de ceux avec qui on est toujours heureux de partager un coin de table. Et cette attitude strictement positive, il ne fait pas que l'afficher : elle infuse aussi une musique tellement positive qu'elle sonne à la limite du débile. Preuve en est, elle attire un plateau de gens aussi divers que la grande prêtresse Erykah Badu ou Lil Yachty, le dandy mongol aux cheveux rouges connu pour son absence de limites. Tout un programme que Shelley Massenburg-Smith doit rendre le moins indigeste et le plus contagieux possible sur album. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que le bougre s'est appliqué.
Oui, ouf de soulagement : le passage par la case album n'a pas donné envie à D.R.A.M. d'intellectualiser le propos. Big Baby D.R.A.M., c'est un peu le filtre Snapchat qui transforme la musique des dangereux gangsters en personnages de Sesame Street. On s'étonne donc peu de l'importante palette de couleurs qu'utilise ce premier LP. Ni trop sage (comme sur l'EP Gahdamn), ni trop débile (comme sur son single "Cha Cha" que Drake a légèrement pompé), Big Baby D.R.A.M ne révolutionne pas ce qu'on connait de ce pimp en jogging rose. Mais il réussit néanmoins à cristalliser toute l'unicité de son personnage dans une carte de visite solide, qui ne ménage pas ses efforts pour s'imposer comme un guilty pleasure à cheval entre le rap et un gospel sorti d'une dimension parallèle.
Il n'y a guère que le côté un peu scolaire du disque qui viendra nuancer ces deux paragraphes emplis d'enthousiasme : il suffit d'une écoute pour capter que ce disque tient toute sa force dans ce qu'il cultive de plus instantané. En fait, on ressort frustrés d'entendre D.R.A.M. offrir ce qu'il a de plus pop, alors qu'on le sent dévoré par l'envie d'imposer une musique davantage libérée, quitte à ce qu'elle perde en lisibilité. Et c'est ce genre de détail qui risque d'influer sur la capacité de ce premier disque à bien vieillir et à marquer les esprits. Car on le comprend vite : tout se jouera sur le deuxième album.
Mais s'il n'explose pas autant de barrières qu'on l'aurait aimé, Big Baby D.R.A.M. tient ses promesses : c'est même un feel good record rempli de tubes de poche, qui ne s'autorise aucun temps mort et devrait être remboursé par la sécu tant il réchauffe les cœurs même par 10°C. Pas une surprise donc, mais au moins la preuve tangible que D.R.A.M n'est pas un faire-valoir juste bon à apparaître aux côtés de Chance The Rapper. On est même d'avis qu'il a les épaules pour devenir un nouveau André 3000, même s'il prouve en 2016 qu'il n'est pour l'instant qu'un Biz Markie de substitution. Mais honnêtement, c'est toujours ça de pris.